Layla Philip, professeur de Yoga, entre le Sud de la France et le Maroc, créatrice de « THEYOGiINME » (salles de Yoga, formations, stages à l’étranger …) nous fait partager son regard à la fois singulier et très vrai sur son « chez soi » ; comment investir un lieu, l’habiter, se l’approprier.

Vivre quelque part où habiter l’espace. Aussi loin que je me souvienne, je n’ai jamais eu Une seule maison, d’abord celle de ma mère en France, celle de mon père au Maroc. Les déménagements de l’une, la maison de ville et la maison d’été de l’autre. L’habitude d’être mobile et de rapidement adopter de nouveaux lieux, d’en faire des espaces à soi, ou d’y trouver son espace s’est imposée à moi. Créant chez l’enfant, l’ado et l’adulte que je suis maintenant, une capacité à m’adapter et à me sentir chez moi partout, ou presque. Je suis aussi déménageuse que voyageuse, j’ai l’impression de ressentir les mêmes choses en embarquant pour un pays lointain qu’en arrivant dans mes nouveaux lieux d’habitation, quelque chose de l’ordre de la découverte et de l’adaptation.

« Je n’arrive jamais dans une nouvelle maison avec des idées préconçues, j’écoute d’abord parler les murs et ensuite je les laisse me guider »

Layla Philip

Étant plutôt adepte de l’ancien et des histoires qu’il a à nous raconter, je n’arrive jamais dans une nouvelle maison avec des idées préconçues, j’écoute d’abord parler les murs et ensuite je les laisse me guider, pour donner un esprit, une décoration au lieu. J’ai toujours fait comme ça, Lieu – Esprit – Déco. En grandissant, pour ne pas dire vieillissant, j’y ai ajouté l’idée de confort et de pratique, pour ne plus simplement habiter mais vivre aussi, fonctionner. Les privilèges (ou les besoins) de l’âge, là où pour certains, la praticité prime sur l’esprit du lieu, il a fallu que je « travaille » à intégrer cette partie. Je vis ici, j’habite là. Ce serait comme faire la distinction entre ne faire que passer et imprégner des murs de ce que nous sommes. Habiter un lieu c’est comme incarner un corps, respecter ses besoins, se respecter soi, les murs; les perspectives doivent nous parler, nous raconter une histoire. Celle d’aujourd’hui, neuve à chaque instant ou celle de ceux qui ont bâti avant nous. La maison n’est plus un apparat, elle dit nos aspirations, nos quiétudes, nos rêves.

Notre expérience récente du confinement a certainement fait basculer nombre d’entre nous dans plus que « vivre quelque part ». La naissance du plaisir d’enfin « habiter » ou la frustration de ne finalement pas sentir nos marques ou nos imprégnations dans ce qui jusqu’ici était notre logement.Le foyer, le lieu de nos joies, habitudes et turbulences, l’intime, déposé chaque jour entre ces murs. Des murs il y en a qui résonnent de bruits, d’autres qui résonnent d’histoire. Ils nous soutiennent, nous inspirent, nous rechargent. Le jardin si contraignant à entretenir il y a quelques années devient le lieu de la possibilité d’une vie, la vraie vie, celle des rythmes indépendants de nous, celle des récoltes, celle des senteurs, et surtout celle d’un espace où la nature a sa place, nous invitant à respecter la nôtre.

« Notre expérience récente du confinement a certainement fait basculer nombre d’entre nous dans plus que « vivre quelque part »

Layla Philip

J’écris ces lignes devant la ligne d’horizon qu’est l’océan, un loft d’artiste perché au dessus d’une lagune fabuleuse, dans quelques mois je quitterai cet abri, ce lieu vitré, ouvert mais pas assez, j’ai eu envie de terre et d’espace, et je navigue déjà entre ces couchers de soleil sur les eaux limpides et les terres fertiles de notre ferme familiale, je vais aller habiter ces hectares d’abondance, et vivre dans une petite maison de terre, rénovée pour m’apporter tout le confort dont j’ai besoin. Et je sais que des maisons, j’en hanterai encore quelques unes, car je suis faite ainsi. Nomade.

Layla Philip, The Wild Clinic, Septembre 2020

Retrouvez Layla dans ses différentes aventures sur Instagram : @the_wild_clinic & @theyogiinme_formations